L’interview-café de Pascal Pinaud

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L’interview-café est un rendez-vous mensuel de La Gazette du Bon Marché. Et par « rendez-vous », on veut dire qu’il est à la fois digital et physique — un moment partagé en magasin, que l’on vous raconte ici.

 

Ce mois de juin 2022, un rendez-vous téléphonique cette fois ! est pris avec le peintre Pascal Pinaud, qui vit à Nice. Ses œuvres font l'objet d’une exposition au restaurant Primo Piano du Bon Marché Rive Gauche.


Découvrez en ce moment l'exposition : « Pas une minute à peindre » chez Primo Piano au 2ème étage.


© Michel Lunardelli

Pas une minute à peindre

Bonjour Pascal, comment allez-vous ?


Je vais très bien. Ravi d’échanger avec vous !

 

— Pascal Pinaud se lève et s’installe sur le canapé. Il en profite pour terminer le verre de jus qui trône sur la table. Avec un brin d’humour, il nous révèle qu’en 50 ans, son rituel de petit-déjeuner, qu’il vient de terminer, n’a pas changé. Au menu : tartines beurrées, café au lait et jus d’orange.


Le titre de votre exposition « Pas une minute à peindre » au Bon Marché éveille la curiosité. Pouvez-vous l’expliquer ?



C’est un jeu de mot par rapport au temps qui passe ! Il y a trente ans, je suis sorti de l’école d’art de la Villa Arson, sur les hauteurs de Nice, avec quatre séries de peintures qui interrogent la pratique de l’abstraction. Aujourd’hui, je suis l’auteur de 36 séries. À travers ce titre, je questionne la posture que le peintre est censé avoir en produisant énormément, tout au long de sa vie.

Quelle est la thématique de l’exposition présentée au restaurant Primo Piano, au 2e étage ?

C’est la thématique que j’explore depuis mes débuts. Elle correspond à une grande question : comment faire de la peinture autrement ? Les 3 tableaux et 9 dessins présentés au sein de l’exposition illustrent cette réflexion au long cours pour sortir des sentiers battus. Les œuvres sont issues de la trentaine de séries que j’ai réalisées durant ma carrière. Chacune, à leur manière, tente de répondre à ce questionnement.

 

Votre travail repose sur des inventions plastiques. Qu’est-ce qui caractérise les peintures et dessins sélectionnés pour l’exposition ?

Depuis 30 ans, j’ai choisi de m’écarter de la pratique classique de la peinture. Je revisite les savoir-faire d’autres métiers artisanaux ou industriels, et j’invite dans mon œuvre les gestes du quotidien. Dans mon processus créatif, j’intègre par exemple des tissus d’ameublement, des fleurs séchées, des fèves… Tout un tas de matières hétéroclites.

En faites-vous la démonstration au restaurant Primo Piano, justement ?


Parfaitement ! On y découvre par exemple une peinture réalisée à partir de la laque de carrosserie automobile, ainsi que des dessins assistés par ordinateur.

 

— Pascal Pinaud s'interrompt. Pour illustrer son propos, il désigne un de ses tableaux, accroché au mur derrière lui. Une pièce originale traversée par des lattes de bois recouvertes de passementeries du XIXème siècle réinterprétées par ses soins, et qui lui demanda six mois de travail.

 

Il n’y a pas un matériau que je préfèrerais à un autre, car je suis en constante recherche de nouveaux terrains d’expression. Ce qui m’amuse dans mon approche, c’est de pouvoir travailler du bois, de la laque et de réaliser des dessins à l’ordinateur dans la même journée. C’est la variété qui m’intéresse. Je ne cherche pas à me spécialiser.

Vous êtes très attentif à l’accrochage des œuvres. Comment celles-ci s’intègrent-elles dans le restaurant Primo Piano ? C’est un lieu de vie…

J’ai joué avec la mise en scène du restaurant qui reproduit l’ambiance d’un appartement. J’ai naturellement choisi les œuvres qui collent aux espaces en termes de dimension. Le challenge fut de les rendre visibles tout en les fondant dans le décor.

  

Votre art — composé de peinture, de photographie et de sculpture est protéiforme. Il y a-t-il une discipline qui domine les autres, en termes de pratique ?

Non, j’apprécie chacune de ces disciplines et j’aime me plier aux contraintes qui leur sont propres, en fonction de chaque projet à réaliser.

Vous exercez en parallèle le métier de professeur à l’école d’art de la Villa Arson. En quoi est-ce important pour vous de transmettre ?


Je veux donner aux autres ce que j’ai reçu. J’apprécie de me frotter aux mécanismes de pensées de la jeune génération. Au final, c’est un échange qui nous enrichit tous.

 

 — Pascal Pinaud affiche un large sourire en mentionnant ses élèves, dont certains ont été distingués par des prix comme celui délivré par la galerie Thaddaeus Ropac, à Paris. 

 

Pouvez-vous révéler la prochaine œuvre qui sortira de votre atelier ?

 

Actuellement, je réalise de grands tableaux sur lesquels je jette et j’écrase des mines de crayons de couleur. J’ai aussi entamé une série réalisée à partir de cartons stockés. Je transforme ces matériaux pauvres en les recouvrant de textiles des années 50. Une nouvelle exploration qui me plaît beaucoup et que j’ai hâte de dévoiler au public.